jeudi 12 janvier 2017

Ils sont devenus flous !

Un tel titre pourrait laisser croire que votre serviteur a, cette fois, définitivement lâché la rampe. Il n’en est rien. Puisque je ne fais pas mienne la devise du regretté Michel Déon (« les carottes sont cuites »), il ne saurait être question de m’enivrer de quelque brouillard morose…
Proverbe de saison (1)
« Noël au Macron, Pâques au Fillon », me soufflait l’autre jour un ami, que je tiens à remercier pour ce bon mot. Qui sait s’il n’a pas sa part de vérité ?
Aurait-on assisté à un « moment Macron » fin 2016 ? En quelque sorte, la révélation de la stature d’un candidat anti-système qui serait passé par quelque banque d’affaires puis par l’Elysée (en tant que conseiller) et le ministère de l’économie. La presse s’engoue encore un peu pour le jeune phénomène et ses apparents succès. Mais qui peut dire qu’en avril…
M. Fillon pourrait bien, lui aussi, souffrir d’un embrasement trop subit. On ne l’entendait plus. Or il lui fallait bien, après ses premiers succès, faire parler de lui. D’autant que certains paraissent redouter ses intentions en matière économique ou sociale, qualifiées ici et là de thatchériennes. Allons, allons… M. Fillon tient à nous rassurer : « je suis gaulliste, et de surcroît chrétien ».
Que l’on puisse se dire gaulliste (ou antigaulliste) en 2017 laisse songeur, mais bon, pourquoi pas. « De surcroît chrétien », en revanche, peut provoquer la perplexité. Naïvement, ne pourrait-on pas penser que c’est « le reste » (y compris, pourquoi pas, une manière de « gaullisme social » qui viendrait de surcroît à un chrétien ? Et qui peut oser dire : « je suis chrétien » ? Pour ma part, je veux bien professer qu’avec l’aide de Dieu j’essaie de l’être…
Mais si, en matière sociale, le christianisme de M. Fillon a les mêmes effets que ceux qu’il a en ce qui concerne l’avortement, il est permis de ne pas se sentir entièrement rassuré.
Proverbe de saison (2)
Le vrai proverbe, chacun le connaît : « Noël au balcon, Pâques au tison ». Comme tous les proverbes, il vaut ce qu’il vaut. Mais s’il se vérifie, nous risquons de fêter Pâques avec de joyeux frissons. Cependant, la presse nous informe d’une descente en Europe centrale d’air froid venu de Scandinavie. De Scandinavie, rendez-vous compte ! Rien que le nom fait grelotter, à se demander comment font les millions de Scandinaves pour encaisser pareils frimas à peu près tous les ans. Cela donne en tout cas de fort belles images de neige et de gel, ainsi que des relevés de températures assortis de points d’exclamation.
Mais n’en faisons pas un plat : cela se nomme l’hiver. Nous en avons déjà vu de tels par le passé et nous en verrons sans doute d’autres. Encore que cela se fasse de plus en plus rare à Paris.
On signale aussi, en même temps que les dures beautés de l’hiver, des morts de froid dans les rues et les campagnes : des vagabonds, des réfugiés… Il est bon, certes, d’avoir une pensée et, mieux, un geste, pour eux. Mais le reste de l’année ? On aurait tort de s’imaginer que la misère se limite à l’hiver. Elle sévit aussi par beau temps.
Paris, étant plus une ville d’Europe occidentale que d’Europe centrale, est pour l’instant relativement épargnée par ce temps hivernal qui s’abat sur notre vieux continent en plein hiver. Le chaud et le froid alternent. Peut-être ces variations ont-elles quelque influence sur les humeurs des hommes en vue.
Belle alliance populaire
Le mot humeur est à prendre ici au sens figuré. Il ne s’agit point des sécrétions peu appétissantes qui ne demandent qu’à déborder de nos nez par temps froid. Pour revenir à nos chers politiciens, penchons-nous à notre gauche.
A gauche comme à droite, on fait désormais dans le yéyé : il faut des primaires. La chose n’est d’ailleurs pas nouvelle à gauche, puisque c’est à ce magnifique outil démocratique que nous devons d’avoir depuis bientôt cinq ans M. Hollande pour président de la république. La gauche bourgeoise ne pouvant se contenter du nom de Parti Socialiste, elle entend s’élargir sous celui de Belle Alliance Populaire. Un peu comme si le Front National troquait Rassemblement Bleu Marine contre Chaleureuse Union Patriotique, comme si EELV lançait sa campagne sous le nom des Gentils Jardiniers, ou comme si Les Républicains™ avaient fait leur primaire sous le nom du Réjouissant Rassemblement
En ce qui concerne la gauche, nous avons appris que M. Valls, qui a changé (tropisme secrètement sarkozyque ?), serait désormais disposé, s’il devenait président, à retirer l’alinéa 3 de l’article 49 de notre constitution. Cela a fait rire, évidemment. Faisons-lui cette suggestion s’il parvient à se faire élire : cette révision constitutionnelle devant sans doute passer par un vote au parlement, M. Valls, s’il rencontre quelque opposition, pourra faire usage, une dernière fois, dudit alinéa. Ne serait-ce pas une belle preuve d’humour de sa part ?
Le même M. Valls n’a semble-t-il pas apprécié que M. Fillon se dise chrétien ; à l’en croire, M. Fillon aurait « défini son projet comme catholique ». On aimerait bien, mais… En tout cas, que l’on n’aille pas dire de M. Valls qu’il n’est pas un défenseur acharné de la laïcité[i], ah mais !
Un qui n’entend pas abuser de la laïcité, c’est M. Peillon. Il faut bien se différencier de M. Valls. Ses propos à ce sujet valent leur pesant de ce que vous voudrez : « Si certains veulent utiliser la laïcité, ça a déjà été fait dans le passé, contre certaines catégories de populations, c’était il y a quarante ans les juifs à qui on mettait des étoiles jaunes, c’est aujourd’hui un certain nombre de nos compatriotes musulmans qu’on amalgame d’ailleurs souvent avec les islamistes radicaux, c’est intolérable. » Cette citation se suffit à elle-même ; point n’est besoin de commenter pareil tissu d’absurdités sur des pages ; c’est en quelque sorte un « sans faute » dans le n’importe quoi. Contentons-nous d’une hypothèse : pris par le temps, M. Peillon (par ailleurs professeur de philosophie) fait écrire ses discours par M. Cambadélis.
(Moment de contrition)
« Si nous voulons progresser dans les pratiques démocratiques, nous devons promouvoir l’exercice du droit de vote en promouvant dans la société un véritable débat qui échappe aux postures, aux "petites phrases" et aux ambitions personnelles. » (Conseil permanent de la Conférence des Evêques de France : 2017, année électorale. Quelques éléments de réflexion)
Comme j’aimerais ne plus plaisanter sur nos politiciens ! Peut-être devrions-nous tous cesser de le faire. Et les politiciens pourraient-ils avoir l’amabilité d’éviter de nous tenter ?
Idioties internationales
Saisi donc par la contrition et en guise de pénitence, je me garderai de me gausser de nos amis les Américains, persuadés pour quelques-uns que l’élection de M. Trump est le fruit d’un complot moscoutaire. Je me contenterai de trouver cela délicieusement rétro, sans être d’ailleurs un admirateur de M. Trump ; je regrette même que l’on ignore quelles eussent été les récriminations de celui-ci si le résultat de l’élection présidentielle américaine avait été différent. Mais il suffit.


[i] Influence maçonnique, diront les plus soupçonneux, qui voient cette influence jusque dans le nom de certaines de nos nouvelles régions, comme Grand Est

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