Le 21 janvier 1793, date funeste dans l’histoire de France, donne chaque année lieu à diverses commémorations. Nous ne dirons rien, ou presque, de la tradition, peut-être encore chère à quelques ventres républicains, qui consiste à manger de la tête de veau tous les 21 janvier, sinon que Flaubert fait dire à un personnage de L’Éducation sentimentale que c’est une preuve de ce que « la bêtise est féconde ». Voilà qui qualifie fort bien, depuis plus d’un siècle et demi, la gastronomie républicaine.
Considérons plutôt
quelques traditions plus recommandables : des messes sont célébrées en
mémoire de Louis XVI, des royalistes se fleurdelysent plus ou moins
discrètement, et votre serviteur se fend ici d’un billet. Il arrive à la grosse
presse de s’y intéresser. Elle rend en général compte de ces commémorations d’un
œil condescendant : tout ce pittoresque tellement vieille France est pour
nos amis les journalistes un genre de folklore plus ridicule qu’inquiétant. Somme
toute, quiconque aujourd’hui sentirait un pincement de cœur en pensant à ce roi
assassiné ou trouverait quelque attrait à l’idée de restaurer la monarchie en France,
passerait plus, à leurs yeux, pour un doux dingue ou un diplodocus inoffensif
que pour un hargneux réactionnaire. Un roi en France ? Un peu de sérieux,
voyons ! Ces royalistes sont d’ailleurs incapables de se mettre d’accord
sur l’identité de l’héritier légitime du trône.
S’il y a du vrai dans ce
dernier argument, qu’il me soit permis de renvoyer nos amis républicains au
spectacle que constitue désormais tous les cinq ans[i] la
campagne pour l’élection présidentielle. Pour ma part, je ne vois pas un, je
dis bien pas un, prétendant qui soit à la hauteur de la charge[ii]. Faut-il
donc considérer l’élection présidentielle comme un folklore plus ridicule qu’inquiétant ?
Non, certes : ce folklore est aussi ridicule qu’inquiétant.
La monarchie héréditaire –
dotée d’un certain pouvoir – ne serait-elle pas en somme quelque chose de plus
sérieux ? Je ne dis pas que c’est possible immédiatement, mais cela mérite
qu’on y réfléchisse.
[i] Que d’éventuels jeunes
lecteurs me pardonnent : j’ai connu l’époque des septennats !
[ii] Que d’éventuels vieux
lecteurs me pardonnent : le général de Gaulle démissionna trois ans et des
poussières avant ma naissance.