… Et alors ? Ce
genre d’information a fini par sortir en décembre du strict domaine des
bulletins météorologiques : c’est qu’il n’avait pas gelé à Paris depuis
plus d’un an ! La grande nouvelle est donc que cet hiver, eh bien, il fait
parfois un temps de saison. Ce n’est pas moi qui m’en plaindrai, du reste.
Charmes
de l’hiver
J’aime à envisager
l’hiver comme une traversée, où il nous faut affronter les épreuves du vent, du
froid, de la neige… De sorte qu’un hiver doux m’ennuie toujours un peu :
alors, cette traversée, quand commence-t-elle ?
Je ne m’étendrai point
sur les beautés et les joies de l’hiver, du vrai : tout a déjà été dit ou
écrit de l’effet de la neige sur la lumière, sur les sons, et même sur les
odeurs. Sortez un jour de neige, goûtez au silence des rues ou des campagnes,
et vous ne pourrez qu’acquiescer.
Certes, l’hiver a ses
désagréments, et ils sont en général liés aux mêmes phénomènes que les plaisirs
qu’il offre : patauger dans la neige, risquer de se blesser en glissant,
etc., etc. Mais j’entends déjà, surtout, l’objection principale faite aux amis
de l’hiver comme moi : et les pauvres, les sans-abri, y avez-vous pensé,
égoïste qui allez après tous ces plaisirs vous réchauffer dans votre intérieur
cossu ?
Oui, bien entendu, j’y
pense. Je sais que l’hiver est particulièrement dur pour ceux qui n’ont rien. Et
mon plaisir n’est pas sans mélange. Cependant, il faudrait préciser aux
indignés du thermomètre que la vie de ceux qui sont à la rue est terrible toute
l’année ; et qu’ils méritent notre attention, nos soins, à la hauteur de
nos moyens (ne serait-ce, outre une aumône point trop mesquine, que par un
sourire, une parole bienveillante et dénuée de toute condescendance), que le
temps soit chaud ou froid.
Deux questions à ces
indignés thermiques : avez-vous déjà souffert de la soif, par un jour
chaud et sec, au point de frôler la déshydratation ? Et avez-vous déjà
bavardé trois minutes avec un vagabond, lui serrant la louche en partant ?
Incertain
climat
Chacun a son avis sur le
temps qu’il fait : sur les étés caniculaires ou pourris, les printemps
tardifs, les hivers absents ou rudes. Aucune méthode ni aucune technique fiable
de datation n’a encore permis d’évaluer l’antiquité de l’expression : y’a
plus de saison, mon bon monsieur. Le climatologue qui sommeille en chacun
d’entre nous aura toujours sa petite explication, souvent influencée par la
mode. Il y a cinquante ans, c’était : « avec toutes ces bombes
atomiques et ces machins qu’ils lancent dans l’espace… ».
Désormais, le grand
coupable, c’est le gaz carbonique[i] issu
de toutes nos activités modernes. Le réchauffement – ou dérèglement –
climatique provoqué par la surabondance de ce gaz dans notre atmosphère est
désormais considéré par beaucoup comme une évidence. D’où les louables efforts
pour en réduire les émissions que nous et nos gouvernants remettons sans cesse
à plus tard, surtout quand une grande conférence internationale n’est pas loin.
Il existe cependant
quelques cohortes de climatosceptiques : de même que beaucoup
invoquent le réchauffement de la planète dès qu’un jour de juillet la
température dépasse les trente degrés où que le temps évoque en janvier un
genre d’octobre aussi éternel que désolant, nos climatosceptiques, à la
première gelée, triomphent, un index docte levé vers le ciel : « vos
voyez bien que votre réchauffement, c’est de la blague ; c’est un truc des
Khmers[ii] verts !
Tous des zadistes en dreadlocks crasseuses, oui ! ».
De tels arguments (si
j’ose dire) sont rarement désintéressés ; on peut les traduire assez
facilement en : « foutez-nous donc la paix, on veut continuer à
puiser et à brûler du pétrole autant que ça nous plaît, d’ailleurs c’est bon
pour l’économie ». Outre que ces propos ne sont pas innocents, ils
sont en général tenus par des gens aussi ignorants que vous ou moi en matière
de climat.
Mais quelque chose me
gêne dans les arguments tenant pour acquis le rôle de l’homme dans le
changement climatique. Je n’irai pas remettre en cause ce que disent des
experts en la matière (je veux bien les croire, du reste, n’étant pas un d’entre
eux), mais il est quand même regrettable que nous ayons besoin d’un risque important
dont la probabilité d’occurrence paraît croître pour nous rendre compte que
nous ne sommes pas censés faire n’importe quoi avec les ressources qui nous
sont données : quels gamins nous sommes ! Réchauffement climatique ou
non[iii], la
Création n’est pas là pour être cochonnée.
En attendant, toujours
pas de neige à Paris cet hiver. Je m’arme de patience.
[i] Ou encore dioxyde de
carbone (CO2), le céhodeux
des journalistes, ravis de laisser entendre que rien ne leur échappe en matière
de chimie. Moi qui ne suis pas journaliste, je me lave le matin au hachedeuzo et, le soir, je tâche de ne
pas abuser du céhachetroiscéhachedeuhohache.
Mais ne voyez point d’ironie dans mes propos.
[ii] Expression détestable,
que je reproduis par pur souci documentaire, forgée sur l’appellation Khmers rouges pour assimiler à des bâtisseurs de goulag tous ceux qui se posent des questions sur les dégâts causés par une activité industrielle effrénée. Pour rendre justice au
peuple khmer, dont le nom n’a pas à servir à n’importe quel propos méprisant,
c’est rouges et non Khmers qui est antipathique. Que l’on
veuille bien f… la paix aux Khmers, qui ont assez souffert ainsi.
[iii] Du reste, les problèmes
posés par l’industrie contemporaine sont nombreux et variés. Ce qui ne dispense
pas de se soucier de celui des conséquences des rejets de gaz à effet de serre…
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Un commentaire ? Inscrivez-vous ! Si vous êtes timide, les pseudonymes sont admis (et les commentaires modérés).