samedi 13 décembre 2014

Quand les loups sortent du bois, on les voit

Les barbichus, autrement dit les intégristes laïcards, semblent s’agiter pas mal en ce moment. Sans doute l’approche de Noël et peut-être – en France au moins – la crise des vocations dans l’Eglise catholique, cette dernière leur donnant de moins en moins de curés à bouffer. Alors, affamés comme des loups, ils sortent du bois et s’exposent.
Libéraux-cocos : zéro partout
On sait à quelles manifestations névrotiques se sont livrés les barbichus de gauche à l’occasion de la récente visite du pape au parlement européen. Ce n’est après tout qu’une tradition chez eux. Un bon exemple en est la lettre ouverte de M. Mélenchon à monsieur le pape[i]. Insister sur le cas de M. Mélenchon serait cependant s’aveugler, puisqu’apparaissent maintenant les barbichus libéraux, tel M. Gaspard Koenig, lequel s’est fendu dans l’Opinion d’un Hommage à Jean-Luc Mélenchon. Voilà donc M. Koenig qui dénonce l’ennemi que serait le cléricalisme et qui qualifie le discours tenu par le pape de « version superficielle de l’altermodialisme ». Et qui s’étrangle de rage à l’idée de voir proposer de « replacer le pouvoir spirituel au cœur du politique ». « Intolerabilis », conclut le nouveau beau gosse agrégé de philosophie à col de chemise béant[ii], histoire de rappeler qu’il a fait au moins dix minutes de latin[iii] au cours de ses brillantes études. On comprend M. Koenig : cette visite du pape vient troubler la tranquillité du culte rendu à la mondialisation joyeuse, à l’économie, à la croissance et à tous les masques que revêt le dieu Business. Le pouvoir spirituel risquerait de faire mauvais ménage avec celui de l’argent[iv].
Cette rage prend des accents que ne renieraient pas quelques joyeux communistes. Au temps de la grandeur de l’URSS, Staline aurait dit un jour : « Le pape, combien de divisions ? ». Un de ces jours, M. Koenig ou un de ses semblables finira par dire : « Le pape, combien de dividendes ? ».
Cela posé, sachant ce qu’il est advenu de l’URSS, j’ai bon espoir en ce qui concerne le libéralisme.
Folklore : ça fait chrétien
L’indignation antiraciste internationale (dont j’avais touché un mot ici l’an dernier) s’est paraît-il encore manifestée aux Pays-Bas à l’occasion de la Saint-Nicolas et de son cortège de Zwarte Piet, si j’en crois le blogue de Fikmonsov. Je n’ajouterai rien à ce que j’en avais déjà dit.
J’ignore en revanche, puisqu’il est question de traditions populaires liées à tel ou tel saint ou à la date à laquelle il est d’usage de le célébrer, si en ce qui concerne la Sainte-Lucie (qui tombe aujourd’hui) des féministes suédoises ont déjà protesté contre la tradition qui veut que la jeune fille de la maison offre des pâtisseries, vêtue d’une chemise et couronnée de bougies. Cela se fait aussi dans les écoles, avec un beau cortège… où maintenant des garçons, çà et là, réclament de faire la Lucie. Sans doute par souci de l’égalité des sexes ou de la modernissime indifférence à ceux-ci : pourquoi un garçon ne pourrait-il pas être une jeune fille comme les autres ? Apparemment, ça ne prend guère : les gens sont vraiment de sales réactionnaires.
Mais revenons à nos barbichus bien de chez nous. Leur furie s’est portée ces derniers temps vers les crèches de Noël que certains élus locaux ont cru bon d’exposer dans leurs mairies ou leurs conseils régionaux. Des gens nommés Libres Penseurs (mais oui, ils existent encore, ce qui vous a un petit charme 1900) ont crié au scandale à ce propos et trouvé le moyen de les faire interdire. C’est sans compter sur l’héroïsme de M. Ménard, maire de Béziers, qui a décidé de ne pas obtempérer. Ah, quel grand résistant !
Si on veut… On est plutôt dans Clochemerle que dans le récit du martyre des premiers chrétiens (ou de celui, plus actuel hélas, des chrétiens d’Orient). Je pourrais m’étendre longuement sur le sujet, mais on trouvera d’excellentes choses ici, chez Koztoujours. Pour faire bref : une crèche dans une mairie ou un conseil régional, ça n’est pas gênant, c’est même plutôt agréable à voir[v] (à condition que ce ne soit pas une horreur, auquel cas : colère !). Mais cela n’est pas gênant non plus s’il n’y en a pas. Tant qu’il y en a à Noël dans les églises… Nous avons donc affaire à un combat ridicule entre gens vains : d’un côté, les libres penseurs, qui ne supportent pas de voir quoi que ce soit qui leur rappellent le christianisme et sont prêt à tout pour emm… les vilains calotins ; de l’autre, quelques politiciens qui utilisent des signes ou des symboles chrétiens (certes passés, parfois affadis, dans le folklore) pour affirmer une identité : on va mettre une crèche, parce qu’une crèche, ça fait chrétien, donc c’est de chez nous, na.
Cela dit, pendant que la Libre Pensée[vi] s’occupe, comme l’écrit Koztoujours, à combattre l’Eglise du XIXe siècle, eh bien cela laisse tranquille l’Eglise actuelle, vivante, etc., etc., qui peut, si les fidèles le veulent, faire œuvre d’évangélisation. On ne peut quand même pas toujours se plaindre.
Que faire des loups ?
Quand ils sortent du bois, il est loisible de les attendre, à l’orée, munis de piques, de massues, de pièges ou de fusils. Ce qui ferait un assez beau tableau de chasse et de fort seyantes fourrures. Mais, à la réflexion, voilà une idée qui ne me paraît pas très chrétienne.
En revanche, puisqu’il a été question plus haut de crèches et que nous devons cette tradition à saint François d’Assise, rappelons-nous ce que ce dernier fit quand il rencontra un loup assez féroce et plus effrayant, sans aucun doute, que le premier libre penseur venu.




[i] Il faudrait dire à M. Mélenchon que ce refus des titres a un petit côté « révolte adolescente » qui n’est quand même plus de son âge !
[ii] Il en faut bien un neuf : BHL commence à se faire vieux.
[iii] On se demande, quand même. Si c’est neutre, il faut plutôt écrire : intolerabile.
[iv] Ne nous perdons pas en de longues exégèses des vaseux propos de M. Koenig (qu’un normalien agrégé de philosophie puisse écrire de pareilles âneries, voilà qui ne me fait presque pas regretter d’avoir fait des études d’ingénieur). D’autres s’en sont fort bien chargés, comme P. Jova (à qui je dois l’image des loups) dans Causeur ou P. de Plunkett sur son blogue.
[v] Et qui sait, cela peut éveiller la curiosité de certains quant à ce que cette crèche représente, au sens de Noël, etc., etc. ; des choses importantes, quoi.
[vi] Koztoujours donne une définition intéressante de la Libre pensée en écrivant : « c’est à se demander si le président de la Libre Pensée utilise vraiment son temps libre à penser. » Ce pauvre « président » est peut-être fort occupé, allez savoir…

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