samedi 14 mars 2020

Pour une étiquette en temps d’épidémie

Une épidémie frappe en ce moment le monde et, si elle s’étend de manière redoutable (au point d’avoir été qualifiée de pandémie), il ne nous paraît pas toujours facile d’en évaluer, imaginer ou comprendre la gravité. Le mal qui se propage semble se situer quelque part entre un très mauvais rhume (aux conséquences bénignes ou fatales) et la grippe espagnole. Dans une telle incertitude, les comportements excessifs ne sont pas surprenants, du déni bravache à la panique, à la terreur, voire au désespoir.
Or, pour les quidams que nous sommes, je ne vois pas pour ma part de conduite viable à tenir en dehors d’une simple et calme prudence. Les autorités, civiles et religieuses, nous y incitent d’ailleurs : que ce soit pour échanger un signe de paix dans la charité du Christ pendant les messes ou pour nous saluer dans notre vie profane, nous sommes enjoints d’éviter accolades, baisers et poignées de main.
Les temps difficiles incitent parfois à une certaine frivolité. Sans doute pour tromper l’ennui ou encore l’angoisse. Les journaux nous ont donc administré quelques anecdotes sur le check du bout des poings où à coups de coudes, voire sur le footshake, manière pataude de se toucher du pied (chaussé, bien entendu) pour se saluer. Quelques responsables politiques en ont fait la démonstration pour la galerie. C’est amusant dix minutes, mais ensuite on s’en lasse.
Une solution plus sérieuse peut consister à chercher des modèles ailleurs : en se mettant la main sur le cœur, à la mode musulmane, ou en joignant les mains avec une inclinaison plus ou moins profonde du buste, selon une coutume que l’on prête aux Asiatiques. Pourquoi pas…
En fait, mille manières peuvent être envisagées, dès lors qu’elles sont dignes et amicales. Montrer la paume de sa main droite (dépourvue de toute arme)[i], ou encore incliner la tête, comme le résumé d’une révérence[ii]. L’essentiel réside peut-être dans les nombreuses expressions que l’on peut donner à son visage. Celles-ci peuvent aller d’une compassion empreinte de gravité, dans les moments douloureux, à une joie fraternelle ou amicale (que l’on veuille bien faire l’effort de sourire des yeux !), en passant par l’encouragement dans les épreuves. Tout est possible pour témoigner de l’amitié, du respect, ou la plus élémentaire des politesses, sans palper les mains de qui l’on rencontre. Il suffit d’y mettre de son âme.
Et c’est une précaution qui pourrait nous dispenser d’avoir à nous claquemurer chez nous pendant des semaines, comme cela arrive à nos voisins italiens. À qui j’adresse un amical sourire.
(Cela dit, les choses ne semblent pas bien tourner : à Paris, nous ne pourrons pas aller à la messe ces prochains dimanches. En attendant de rester longtemps enfermés chez nous ? Des choses étonnantes se passent d’ailleurs de toutes parts, puisque l’on a entendu M. Macron, dans un discours aux accents nobles quoique grandiloquents, annoncer la nécessité d’une politique qui serait l’exact contraire de celle qu’il a menée sans discontinuer depuis bientôt trois ans.)


[i] Ce qui serait l’origine du salut militaire.
[ii] Sans en faire trop : il n’est pas nécessaire de se mettre en même temps au garde à vous en claquant des talons, à moins de vouloir se donner des airs prussiens.

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