samedi 4 janvier 2014

Pour en finir avec les Femen

Lors de mes récents vœux, j’émettais le souhait de voir moins de haine, d’hystérie et de violence cette année. Il existe à travers le monde des formes particulièrement atroces de haine, de celles qui menacent la vie de personnes pour ce qu’elles sont ou pour ce en quoi elles croient. Il n’est besoin, pour le savoir, que de s’informer, par exemple sur les persécutions qu’ont à subir les Chrétiens dans de nombreux pays.
Ici, évidemment, nous sommes au chaud ; nous ne devrions pas avoir à nous plaindre : il nous est permis de fréquenter les paroisses que nous souhaitons fréquenter, sans risquer notre vie, notre intégrité physique ou notre liberté. Il existe cependant une haine envers l’Eglise catholique qui tend à se manifester en ce moment en Europe – et plus particulièrement en France – sous la forme d’une certaine violence, disons symbolique.
La vulgarité et la bêtise crasse de telles attaques pourraient nous inciter à hausser les épaules : en deux mille ans, les Chrétiens en ont vu d’autres et, à travers le monde, répétons-le, en voient en ce moment de bien pires. Et, après tout, heureux sommes-nous si on nous insulte à cause de notre foi.
Nous le savons bien et, cependant, ces insultes ne sauraient nous laisser tout à fait indifférents.
Mais qui, que, quoi ?
Pour être un peu plus explicite, je veux parler des grotesques actions menées par les Femen. Je ne pousserai pas ma petite hypothèse sur les éventuels financements dont bénéficierait ce pénible groupuscule. Ni sur les soutiens dont il jouirait de la part d’instances gouvernementales. Je n’en sais rien.
Contentons-nous, au pays de M. Peillon et de sa religion républicaine, de supposer de la part desdites instances, une certaine mansuétude.
Comment supposer autre chose ? Que je sache, ces personnes se livrent régulièrement à des actes d’exhibitionnisme, accompagnés d’injures, de coups parfois, et aussi de vandalisme. Il y a des lois contre cela.
(J’écarte volontairement le caractère éventuellement sacrilège[i] de leurs agissements lorsqu’elles pénètrent dans des églises : personnellement, cela me révulse, mais les lois sont censées punir les délits et non les péchés.)
Haine et possession
Que nous disent les Femen ? A peu près rien, si ce n’est l’expression fruste d’une haine contre tout ce qui n’est pas conforme et contre tous ceux qui ne sont pas conformes à un modèle assez vague de modernité. Il suffit de lire les récits de leurs sinistres pitreries ou d’en voir quelques images pour être convaincu de la pauvreté de ce qui leur tient lieu de pensée.
Cette pauvreté m’a sauté aux yeux – ou plutôt aux oreilles – lors d’un entretien que leur « chef », Inna Chevtchenko, avait accordé à France-Culture l’an dernier (entretien dont j’avais déjà touché quelques mots ici) : les propos qu’elle tenait pour répondre aux questions de quelques journalistes complaisants – dont la pittoresque Caroline Fourest[ii] – et le ton qu’elle employait étaient plutôt ceux d’un automate que d’un être doué de raison ; en gros, elle récitait en se répétant inlassablement un texte selon lequel les religions sont fascistes, qu’il faut éliminer les fascistes, et que cela sera fait un jour[iii]
Ces propos appellent quelques remarques ou questions.
Premièrement, comment ne pas être surpris d’entendre s’étaler pendant trois quarts d’heure pareilles crétineries sur une radio d’Etat dont les prétentions sont, paraît-il, culturelles ? Faut-il croire que France-Culture serait devenue un canal de basse propagande ? Ou qu’il s’agissait de ce qu’on nomme, dans le jargon de l’art contemporain, une performance ? Il faudra y revenir.
Deuxièmement, la récitation entendue peut nous amener à nous demander où l’on est capable aujourd’hui de pratiquer un lavage de cerveau aussi efficace, au point d’avoir envie de supplier la personne qui la débite de changer de disque. Mais, après tout, le caractère répétitif de cette récitation, de même que celui des actions des Femen, relève peut-être aussi de l’art contemporain.
Troisièmement, le caractère hystérique des manifestations des Femen et la faiblesse de leurs arguments (quelques slogans débiles et volontiers blasphématoires accompagnant des mises en scène parodiant grossièrement l’iconographie ou la liturgie catholiques) me rappellent toujours une note de Huysmans dans sa préface à une étude du journaliste Jules Bois  sur Le satanisme et la magie (1896) :
« Le recueil officiel des prières Lucifériennes vient d’être publié : il contient des formules d’évocation infernales et des séries de dithyrambes démoniaques d’une bêtise rare. »[iv]
Exagérerais-je en parlant de possession ? Je ne crois pas. Il m’arrive de me demander si l’imbécillité presque sans bornes des rites sataniques ou apparentés[v] n’est pas une ruse du diable pour faire croire qu’il n’existe pas : voyons, diront les esprits bien carrés, ses adorateurs sont si ridicules qu’il ne saurait exister.
Soit, je ne sache pas que ces pauvres péronnelles entretiennent un commerce quelconque avec des êtres cornus et malodorants, mais ce pourquoi elles vomissent l’Eglise tourne toujours – ou presque – autour de sujets dits sociétaux, comme récemment l’avortement. Elles se posent ainsi en supplétives de ce qui est souvent nommé – à juste titre de mon point de vue – culture de mort[vi].
Pour faire bref, nous avons affaire à des auxiliaires d’un projet social où donner la mort serait considéré comme un droit et une liberté. Le projet d’un monde sans autres aspirations que celle de « jouir » sans se préoccuper d’autrui. D’un monde parfaitement desséché, stérile. C’est bien cela qui est diabolique.
Mais que font les autorités ?
Le caractère délictueux de nombreux agissements des Femen (déjà mentionné plus haut) ne semble guère préoccuper nos autorités, pourtant si promptes à s’émouvoir pour des histoires –certes lamentables – de bananes et de quenelles[vii]. Au contraire, il se dit que la « Marianne » des nouveaux timbres ordinaires aurait été inspirée par le visage d’Inna Chevtchenko, encore elle. L’intéressée aurait déclaré à ce sujet être ravie de ce que les « fascistes » soient obligés de lui « lécher le cul » pour poster leurs lettres. Toujours ce discours riche et ouvert au dialogue…
En ce qui concerne les timbres, trois remarques.
Pour commencer, ces timbres sont autocollants (enfin, pour la France, en tout cas). Pas besoin de les lécher, par conséquent (pour l’étranger, une petite éponge humide, et hop !). Mais il est toujours possible de s’assurer de leur tenue sur l’enveloppe d’un ferme coup de poing.
Ensuite, faut-il rappeler à cette grande intellectuelle qu’elle n’est pas sur le timbre ? Ce n’est qu’une image. C’est pour de faux, ma grande !
Enfin, c’est l’occasion d’aller au bureau de poste pour découvrir des séries de timbres parfois encore jolies.
(D’ailleurs, vous savez, mon poing n’ira jamais sur le visage d’une femme, et je ne lèche le cul de personne.)
Propositions
Quelles réponses apporter à ces pénibles manifestations ? Evidemment, les coups de pied au derrière sont tentants. Mais répondre à une violence par une autre violence me semble une erreur, peut-être grave, même.
L’exorcisme, alors ? Mais il faudrait que les intéressées s’y prêtent.
La prière, peut-être ? Pourquoi pas ? Il faut prier pour ses ennemis. Et penser à l’attitude, humble et noble, de Mgr Léonard, archevêque de Malines-Bruxelles, lorsqu’il se fit agresser par des Femen l’an dernier. Le contraste avec les harpies est assez saisissant.
Pour quoi prier, dans ce cas ? Pour leur conversion ? Ce serait assez beau, ma foi. Mais il faudra être patient. On sait que, dans leur vision anatomique de l’être, les Femen connaissent les seins, les fesses et depuis peu la vessie, comme je l’ai écrit récemment (sans me vanter). Il leur faudrait maintenant découvrir le cerveau, puis le cœur. Malheureusement, c’est le foie de veau qui semble constituer leur dernière découverte[viii].
En attendant un miracle, il faut bien faire quelque chose. C’est là que le rapprochement avec l’art contemporain prend tout son sens.
L’art est toujours plus ou moins célébration ou exaltation : de la beauté, de la foi, de l’amour, de la joie, de la peine ou de toutes sortes de sentiments. L’inspiration y fait beaucoup, et cela peut être réussi si l’artiste est doué, travailleur ou habile. L’art contemporain, dans cet ordre, peut être vu comme une célébration du néant de notre époque. Pourquoi alors ne pas enfermer les Femen dans un musée ou un théâtre[ix], où elles pourraient se livrer à une performance permanente, devant un public forcément éclairé et avancé, tout en nous fichant une paix royale ?
Elles finiraient peut-être par s’en lasser, du reste.

[i] Techniquement, pour ainsi dire, pas tout à fait (pas de profanation). Mais il n’en reste pas moins un trouble…
[ii] La meilleure comique de gauche du moment, à mon avis. Guy Bedos a bien fait d’annoncer sa retraite. L’ennui pour la dame, c’est qu’elle semble se prendre très au sérieux. Mais c'est encore Basile de Koch qui en parle le mieux.
[iii] Ce corpus impressionnant se nomme apparemment sextrémisme. Le genre de jeu de mots qui ne m’amusait plus quand j’avais onze ans.
[iv] Cette préface est facilement accessible, dans l’édition Folio de Là-bas.
[v] Ne craignez rien, je ne les connais que par ouï-dire.
[vi] On pourra lire aussi ceci avec profit (chez Koztoujours), sur certaines actions des Femen en Ukraine.
[vii] Ça sent la cuisine politique… Mais ne nous plaignons pas trop ; certains politiciens, même de gauche, ont émis quelques protestations contre la dernière action des Femen à Paris.
[viii] Le 20 décembre, dans l’église de la Madeleine. Outre leurs grossiers et crispants blasphèmes, vu le prix du foie de veau, l’usage qui en a été fait s’appelle se foutre de la gueule des pauvres.
[ix] Au hasard : pourquoi pas au théâtre du Rond-Point ?

1 commentaire:

  1. Post-scriptum : il n'y a pas que les Femen pour tranquillement cracher sur les Chrétiens ; je viens de lire qu'une équipe de Canal Plus s'était introduite dans une église parisienne pendant un office pour s'y livrer à des pitreries (il paraît que c'est de l'humour). La réaction du curé de cette paroisse (non dénuée d'humour) et celle de ses paroissiens me semblent être de bons exemples d'un comportement chrétien face à de telles incongruités.
    Quelques détails ici : http://plunkett.hautetfort.com/archive/2014/01/21/tele-caniveau-contre-paroissiens-5277934.html

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