samedi 13 juillet 2013

Quelques réflexions à la volée

Il n’échappera à aucun Français que nous serons demain le 14 juillet, puisqu’aujourd’hui nous sommes le 13. Il paraît que c’est le jour où « nous avons pris la Bastille », nous libérant enfin du joug de la royauté qui, comme chacun s’en souvient douloureusement, nous écrasait d’impôts, nous interdisait l’accès aux plus hautes charges et ne nous permettait pas de penser comme nous le voulions.
Sur la royauté
Le sujet est en ce moment d’une certaine actualité, du fait de l’abdication d’Albert II, roi des Belges. Toutes sortes de réflexions plus ou moins oiseuses ont été faites à cette occasion.
J’ai lu ou entendu, ici ou là, qu’il n’y avait qu’à profiter de cette abdication pour établir une république en Belgique, ainsi que dans d’autres royaumes européens. Cela mettrait enfin un terme, paraît-il, à des institutions d’un autre âge et fort coûteuses. Il est de notoriété publique, en effet, qu’un couronnement tous les quinze à cinquante ans environ coûte infiniment plus cher et fait perdre à un pays infiniment plus de temps qu’une campagne électorale tous les quatre, cinq ou sept ans.
Abandonnons un instant notre ton ironique pour relever trois immenses avantages de la royauté sur la république.
Premièrement, un roi n’est pas en campagne. Il n’agit pas en pensant à la prochaine élection, ne se dépense pas à commander ni à consulter des sondages. Il est là aussi longtemps que ce que lui permettent ses forces, les faveurs de Dieu (si l’on veut bien croire en Lui) et celles du monde – qu’il n’est pas forcé d’épouser mais qui existe.
Deuxièmement, un roi ne devient pas roi parce qu’il a tout mis en œuvre pour le devenir, mais parce que cette charge lui échoit un jour. Certains me répliqueront que c’est injuste et me citeront un bout de monologue de Figaro sur « la peine de naître » pour me contredire. Peut-être, mais le fait de recevoir une charge en héritage peut permettre à un roi de comprendre qu’il n’est pas un être aux mérites supérieurs. S’il veut bien se donner la peine d’y penser.
Troisièmement, n’ayant pas été candidat, le roi n’est pas l’obligé d’un parti politique ni celui des quelques mécènes qui auront financé sa campagne.
Bien entendu, tout cela s’applique uniquement à une monarchie établie, où le roi disposerait de quelque pouvoir…
Pour revenir au cas particulier du roi des Belges, Albert II ayant une ou deux fois dû tenir à bout de bras son pays non sans avoir à morigéner quelques politiciens, il y a de petits malins, forts d’un don de prophétie que je n’ai pas, pour nous annoncer que son abdication est un signe de la fin prochaine de la Belgique et qu’à ce compte il n’y a qu’à rattacher la Wallonie à la France. Pourquoi pas, mais dans ce cas je propose d’inclure le futur roi des Belges dans l’affaire. Et d’en faire le roi de France. Je ne sais pas ce qu'il vaut, mais il ne saurait être pire qu'un président de la République, vu ce que nous avons eu en magasin ou en vitrine ces trente ou quarante dernières années.
Sur la république
Qu’est-ce qu’un président de la République ? Chez nous, c’est en général un politicien plus très jeune qui aura, de manière plus ou moins discrète, patiente et élégante, commencé par écarter les membres de son parti qui lui faisaient de l’ombre.
Ensuite, aidé de publicitaires grassement payés, il aura couvert le pays d’affiches à son effigie portant un message déterminant, comme « la France unie », « la France pour tous », « ensemble, tout est possible » ou encore « le changement, c’est maintenant ». Ceux qui espéraient un poste quelconque se seront répandus en éloges à son égard – même ses concurrents de la veille qui n’avaient pas de mots assez durs pour le qualifier – et il aura prononcé de beaux discours pleins de promesses et de rêves éveillés devant ses partisans. Ces derniers auront à l’occasion arboré des ticheurtes, agité des drapeaux ou lâché des ballons aux couleurs vives.
Dans les jours précédant l’élection, nous aurons pu lire un tract, imprimé par millions et nommé sans rire profession de foi. Nous aurons pu y lire, par exemple, son intention de réenchanter le rêve français. Passons sur le fait que j’ignore ce qu’est le rêve français et que je ne crois pas aux enchantements…
Puis l’heureux élu croira pouvoir faire tout ce qu’il voudra ou ce que ses partisans auront attendu de lui, puisqu’il l’avait promis. Il a déjà oublié (a-t-il jamais voulu le savoir ?) qu’en fait la petite majorité qui lui a permis d’en arriver là l’a fait par lassitude ou par manque de confiance envers son adversaire. A sa décharge, ceux qui auront voté pour lui et s’offusquent de le voir appliquer son programme auraient dû y réfléchir…
Enfin, le temps étant bref, il songera vite aux moyens de se faire réélire.
Dans La mauvaise réputation, Georges Brassens chantait :
Le jour du quatorze juillet,
Je reste dans mon lit douillet.
Moi aussi, vous l’aurez deviné. Sauf quand notre « fête nationale » tombe un dimanche. Je vais alors à la messe, tout simplement.
Ce qui ne me dispense pas d’avoir une pensée fraternelle pour les militaires qui, en plus d'engager souvent leur vie ou leur conscience sur la décision d’un politicien, doivent tous les ans défiler devant lui.
Sur le Pape
Le Pape s’est rendu cette semaine sur l’île de Lampedusa, où il a célébré une messe en présence d’immigrés africains qui ont échoué sur ce rivage. Dans son homélie, il a rappelé que notre indifférence à leur égard ainsi qu’à l’égard de ceux qui sont morts en route est mauvaise.
Scandale, évidemment, pour des bourgeois propres sur eux ou pour des politiciens de droite. Ils accuseront l’Eglise de naïveté, de complaisance, voire de complicité envers ces envahisseurs inassimilables. Ils n’ont rien compris, ce qui n’est pas une surprise.
Le Pape ne nous parle pas, il me semble, de l’immigration, qu’il est ici nécessaire de ranger au magasin des idées générales. Il nous parle de personnes, et de personnes qui souffrent de misère. Et nous rappelle qu’un Chrétien se doit d’être aussi leur serviteur. Quoi qu’il pense, par ailleurs, des flux migratoires (personnellement, je n’en pense pas moins, mais ce que j’en pense n’est pas le sujet de la présente causerie).
Ce qui m’inspire une réflexion à propos de ceux que scandalise le Pape en particulier ou l’Eglise en général. A gauche, on lui reproche son « conservatisme » en matière de mœurs et, à droite, son « angélisme » pour les pauvres, les ouvriers ou les étrangers. Visiblement, l’Eglise agace les politiciens parce qu’ils n’arriveront jamais à la récupérer pour leurs petits calculs, et les journalistes parce qu’ils n’arriveront jamais à la faire entrer dans une des petites boîtes dans lesquelles ils rangent un peu tout le monde. Pour ma part, je vois dans l’agacement que provoque ainsi l’Eglise un bon signe pour elle : un signe de vie.
Bonnes vacances !
Si vous en prenez cet été, je vous les souhaite excellentes ! En ce qui me concerne, les vacances, c’est maintenant. Pas de nouveau billet de votre Chatty Corner préféré avant trois semaines, par conséquent.

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