Curieuse aura que celle
des basiliques ou des cathédrales : les auteurs de manifestations
déplacées de tout genre semblent attirés par elles comme par des aimants. De
temps à autre y pénètrent, pour en perturber la vie, des fous, des bouffeurs de
curé, des néopaïens suicidaires, des intégristes mécontents… On peut même y
rencontrer des militants de gauche empêchant par leur bruit qu’une messe soit
célébrée, comme ce fut le cas un dimanche récent à Saint-Denis. Accompagnés de
quelques migrants dont ils disaient vouloir défendre les droits, ces militants
ont cru opportun de prendre une église pour une tribune.
Ce genre d’événement –
parfaitement regrettable – n’a pas manqué, on l’aura deviné, de provoquer une
de ces vaines querelles dont notre époque a le privilège, menée comme il se
doit à coups de touites. A droite, et surtout très à droite, on s’est
étouffé d’indignation : « En appelant des migrants à profaner la
basilique Saint-Denis, nécropole de nos rois, "La France Insoumise"
et l’extrême-gauche démontrent que, dans leur folie immigrationniste, ils sont
prêts à piétiner notre civilisation et à profaner un lieu de culte
historique », a touité Mme Marine Le Pen. A gauche, très à gauche, on
s’est justifié en prétendant qu’envahir une basilique avant la messe va dans le
sens de ce que prône l’Eglise en matière d’accueil des étrangers :
« J’assume d’avoir soutenu cette occupation sans irrespect ni violence de
sans-papiers qui ont rappelé symboliquement qu’une église était du côté du
droit d’asile et des plus démunis », a touité M. Éric Coquerel, député
« France insoumise ».
Passons sur le fait que
M. Coquerel confonde une église et l’Eglise. En ces temps de désert spirituel…
Disons que l’Eglise est favorable à l’accueil des personnes et que la basilique
Saint Denis est une église qui est du côté de Saint-Denis.
Soyons bref, aussi, sur
l’emploi – peut-être abusif – du mot profanation par les chantres de la
France éternelle-et-très-chrétienne dont certains ne s’étaient pas autant
indignés au moment du suicide du pauvre Dominique Venner devant un autel de
Notre-Dame de Paris, geste qui lui était indéniablement une profanation. On ne
sache pas que les migrants venus causer du désordre à Saint-Denis soient allés
danser au milieu des quelques sépultures royales qui s’y trouvent encore après
l’affreuse profanation qui eut lieu pendant la Révolution française sur l’ordre
de ce qui tenait alors lieu d’Etat. Ni qu’ils aient fait des saletés devant
quelque autel ou tabernacle. En revanche, on voit où veulent en venir
quelques-uns desdits chantres quant à la présence, non dans une basilique, mais
en France d’étrangers en situation irrégulière.
En somme, tout cela
relève du petit jeu habituel, qui est pour tout dire assez lassant. Nous avons
même eu droit aux explications d’usage des Décodeurs du Monde,
pâteuse et approximative comme il se doit.
Cependant, une réaction à
cet événement et aux réactions qu’il a provoquées mérite notre attention. C’est
celle de Mme Clémentine Autain, députée « France insoumise » comme M.
Coquerel. « Mais il n’y a rien à profaner. On a tout mis à la fosse
commune en 1793 », a touité la dame. Comment dire ? C’est simplement
abject, « tout » désignant ici les restes de quelques rois, reines et
princes. Les titres de ces derniers ne font d’ailleurs rien à l’affaire,
nonobstant mon royalisme de principe : il s’agit de restes humains, que
Mme Autain semble se réjouir de considérer comme des déchets bons pour la
benne. Il en est, à l’instar de Georges Clemenceau, pour qui la Révolution est
un bloc : tout y est bon, y compris les massacres et les profanations de
sépultures. Ces gens ne m’ont jamais rassuré.
Que dire à tout ce
monde ?
A M. Coquerel, pour
commencer, qu’il ne faut pas confonde Eglise et église et qu’une église n’est
pas une quelconque salle de métingue où l’on cherche à donner de la voix et à
se donner de l’importance. La basilique Saint-Denis ne s’appelle pas la Scène
Saint-Denis, que je sache. Quant à l’Eglise, s’il approuve comme il
l’affirme sa générosité envers les immigrés, il lui eût été loisible d’amener
ceux qu’il prétend défendre assister en silence à la messe qui par sa faute n’a
pas été célébrée, afin de leur faire découvrir et peut-être de découvrir
lui-même la source de cette générosité.
Aux droitards de tout pelage
si attachés à nos églises, et je l’espère à l’Eglise, que celle-ci considère
l’accueil des étrangers comme une des sept œuvres corporelles de miséricorde.
A Mme Autain,
qu’ensevelir les morts est pour l’Eglise une autre de ces sept œuvres
corporelles de miséricorde.
Et à nous, catholiques,
pour ne pas céder à la tentation de traiter tous ces gens d’imbéciles, que
supporter avec patience les personnes ennuyeuses fait partie des sept œuvres
spirituelles de miséricorde.
Enfin, il faudrait dire
qu’il y a des choses plus graves, plus terribles, qui se passent chez nous en
ce moment. Dans de telles circonstances, certains touitent, d’autres offrent
leur vie pour sauver celles de leurs compatriotes face à des assassins qui nous
haïssent. J’ajoute cette précision en mémoire du lieutenant-colonel Beltrame.
Bonne Semaine
sainte !
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