Il n’aura échappé à
personne – ou à peu près – que, depuis quelques semaines des milliers de
personnes venues notamment de Syrie parcourent en tous sens les routes d’Europe.
Ces personnes constituent la part visible – et désormais sensible – d’un
mouvement entamé depuis des années, mais qui nous touchait sans doute moins
tant qu’elles s’entassaient dans des camps au bord de la Méditerranée.
Il nous sera donc de plus
en plus difficile de faire comme si ces gens n’étaient pas là. Nos réactions ne
pourront certainement plus se résumer à de vaines et éphémères pleurnicheries
ni à de tout aussi vaines ratiocinations. Même s’il faut reconnaître que la
publication récente de la photographie d’un petit garçon mort sur un rivage a
donné lieu à des réactions particulièrement caricaturales dans les deux sens :
entre les donneurs de leçons médiatiques et les autoproclamés experts en noyade
flairant la mise en scène, il n’est pas indispensable de choisir son camp…
La seule sagesse réside
bien sûr dans un accueil prudent. Le pape, par exemple, n’a pas dit autre
chose, enfin il me semble. Ce dont on peut déduire que des efforts seront
demandés aux populations des différents pays d’Europe, mais aussi à ceux qui
prétendent les gouverner.
Dans le cas de ces
derniers, il s’agit donc d’encadrer ce mouvement : non en faisant tomber
les frontières, mais en les entrouvrant et en se renseignant efficacement sur
ceux qui les franchissent.
Or le moins qu’on puisse
dire des gouvernements européens est qu’ils se livrent depuis début septembre à
de flamboyantes démonstrations d’improvisation. Les uns et les autres font
montre tour à tour d’une générosité frisant l’aveuglement et de postures mimant
la fermeté et révélant souvent une forme d’égoïsme : en résumé, ils
veulent faire « humain » ou faire « homme », selon
leur humeur[i].
Du reste, il n’y a rien d’étonnant
là-dedans, si l’on pense à la Syrie et si l’on prête foi à de récentes
déclarations de M. Martti Ahtisaari, ancien président finlandais. A l’en croire
(ici dans le Guardian ou là dans le Figaro), bien des horreurs
auraient pu être évitées dès le début de 2012 si une proposition émanant de la
Russie avait été prise au sérieux par d’autres. Pensez-vous : une
proposition russe ! Peuh…
Début 2012 ? En France,
nous allions passer, disons de Sarkozy-Fillon-Juppé à Hollande-Ayrault-Fabius. Laissons
tranquille M. Ayrault, qui compte sans doute pour du beurre (nantais, bien
entendu), mais n’oublions pas les autres. Peut-être, dans leur légèreté, se
sont-ils rendus coupables d’une faute des plus graves. N’étant pas connaisseur
en matière de diplomatie, j’ignore si la proposition russe était réalisable. Mais
elle eût certainement valu la peine d’être examinée.
Nos mirobolants
politiciens rendront-ils jamais des comptes pour de telles fautes ?
Allons, ils seront capables de dire qu’il n’est pas bon de remuer le passé
(dont ils ont d’ailleurs su tirer toutes les leçons), et que c’est l’avenir qui
compte.
Il y a des choses importantes en ce moment : bientôt
les élections régionales ! Les plus ambitieux, les
plus visionnaires, songent même à 2017.
[i] Ne parlons pas des
Etats-Unis, où les gouvernants semblent n’avoir cure de cette histoire, sans se
soucier de leur part de responsabilité dans ce drame…
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