Le remaniement ministériel que nous avons connu
récemment en France semble avoir fait le bruit prévu pour couvrir celui de
l’effondrement du Parti Socialiste aux élections municipales. Que
voulez-vous : les Français ont la
mémoire courte, comme disait… qui, déjà ?
C’est possible. Mais on peut aussi incriminer – et
c’est presque devenu un truisme que de le faire – le flux ininterrompu
d’informations d’une importance inégale (et indifférente) dont l’Européen moderne
est gavé.
Certains ont probablement la mémoire moins courte.
Ce qui est sans nul doute le cas du président Hollande, que l’on présente trop
souvent comme un faiseur de blagounettes[i]
tout juste bon à présider une soirée loto dans un chef-lieu de canton corrézien[ii].
Prenons un exemple.
La nomination il y a quelques jours de M. Harlem
Désir au poste de secrétaire d’Etat aux affaires européennes n’a pas peu
contribué au vacarme ambiant. Pensez donc : voilà un homme que l’on nomme
secrétaire d’Etat parce qu’il faut bien en faire quelque chose, le monsieur
semblant désormais inapte à diriger un parti politique. Scandale ! Comme
tout un chacun, je n’y ai d’abord vu que l’illustration grossière de ce qu’est
devenu le petit monde des politiciens : un bureau de placement en vase
clos (« tu as tout foiré au parti, tu as passé deux ans à te ridiculiser
et à nous ridiculiser, mon ami ? Faut bien te virer. Mais ne crains rien, on
va te recaser au gouvernement. »). Et certains de rappeler ce bon vieux
jeu de mots remontant au temps où M. Désir dirigeait SOS racisme, association apolitique comme on le sait[iii] :
« Touche pas à mon poste ! ».
Bon, pourquoi pas. Mais, après plusieurs jours de
réflexion, j’ai fini par y voir un bon exemple de l’habileté manœuvrière de M.
Hollande, de sa ruse aux multiples tiroirs (où l’on comprendra qu’il est tout
sauf un capitaine de pédalo). Je
m’explique.
Vous n’aurez pas oublié, je l’espère, la liaison
avec une actrice que l’on prêta cet hiver[iv]
à notre cher président. Nous ne discuterons pas ici du bien-fondé ou non de ce
qui nous a été raconté. Notons cependant que cette affaire a permis à M.
Hollande de donner son congé à Mme Trierweiler avec tout le tact dont on le
sait capable. Oui, mais à quelle fin ? Vous êtes perplexe ? C’est
pourtant simple : M. Hollande, sentant enfin venir le désastre électoral
qu’il préparait depuis bientôt deux ans, allait pouvoir remanier le
gouvernement et le PS[v].
Mais enfin, pour quoi faire ? Eh bien, pour ramener Mme Royal sur le
devant de la scène, chose impossible tant que Mme Trierweiler traînait dans les
couloirs de l’Elysée, et faire rebondir la carrière de M. Désir. Vous ne
comprenez toujours pas ? Allons, encore un petit effort, nous y sommes
presque : avec un nouvel élan dans la carrière de M. Désir, au sein du
même gouvernement que Mme Royal, on va à nouveau pouvoir parler de Désir d’avenir[vi] !
J’entends d’ici monter des cris d’indignation :
quoi, tout ce laborieux raisonnement pour faire une nouvelle blagounette[vii] ?
Tout ça pour ça !
Ceux qui poussent de tels cris n’entendent
visiblement pas grand-chose aux nécessaires subtilités de la haute politique.
Moi non plus, d’ailleurs.
Plus sérieusement, et sans m’attarder sur le premier
anniversaire de cette misérable chronique (écume, écume…), qu’il me soit permis
de vous souhaiter de très joyeuses et saintes fêtes de Pâques !
[i] Mon Dieu, que ce mot est
laid ! Je trouve qu’il sue la vulgarité.
[ii] Une telle supposition me
semble fort méprisante à l’égard des Limousins.
[iii] Ce ne sont, par exemple,
ni M. Désir ni M. Malek Boutih qui prétendraient le contraire. Une aussi
irréprochable imperméabilité vis-à-vis du PS me fait penser à l’UNEF-ID du
temps de la loi Devaquet et à l’UNEF du temps du CPE ; mais je m’égare…
[iv] Si l’on peut appeler cela
un hiver (remarque d’un homme qui aime la neige).
[v] Eh oui ! Désormais,
le gouvernement et le parti politique majoritaire à l’assemblée sont difficiles
à distinguer. Enfin, je dis « désormais »…
[vi] Vous ne vous rappelez
pas ? Le mouvement d’autopromotion de Mme Royal au sein du PS il y a un
lustre ou deux. On ne sait trop ce que c’est devenu (et on s’en f…, du reste).
[vii] Décidément, ce mot n’est
pas moins laid qu’au début de mes réflexions de ce jour.
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