La météo, paraît-il, n’exclut pas la possibilité de
forts coups de vent ces prochains jours. Voici donc des propos qui risquent d’être
vite emportés. Tant pis.
Zaubernatale
Nous aurons tous vu ces derniers jours la publicité
d’un opérateur de télécoms :
« Magic Noël », le
« A » étant transformé en « 4 ». Passons sur cette astuce
visuelle, à peu près aussi vieille que la publicité. Mais, ah, ce magic qui, par son orthographe anglaise
nous fait entrer dans la modernité, la vraie : magique, ce serait sans doute trop long, donc pas productif. C’est
sans doute dans un souci d’efficacité que ce charabia a été retenu ; Zaubernatale, par exemple, bien que tout
aussi amphigourique, n’aurait eu aucune chance…
Une remarque en passant : Noël n’a rien à voir
avec quelque magie, quelque enchantement ou quelque féérie que ce soit. Chez
les adorateurs de Mammon, je ne dis pas, mais pas pour moi, merci. La venue du
Christ parmi nous, c’est quand même autre chose, non[i] ?
De l’usage des bonnets rouges
Pour continuer sur Noël, il y a bien le bonnet rouge
du gros barbu, vous savez, celui qui se trimbale sur son traîneau enchanté tiré par des rennes[ii]
magiques… Et il y a celui que l’on
accommode à toutes les sauces en ce moment. Dernier usage signalé : lors
d’une manifestation de mini-miss,
dont les mères protestent contre l’interdiction des concours de beauté pour enfants[iii].
« Laissez-nous vivre notre rêve ! », clament ces mères pleines
d’amour. Et quel rêve, en effet : exhiber sa fille devant un jury qui la
trouvera plus ou moins belle, comme un joli petit veau aux comices agricoles.
Serait-ce là le fameux rêve français[iv]
que M. Hollande disait vouloir réenchanter ?
Décidément, on ne sort pas de l’enchantement.
Cette dérisoire protestation est à mettre en
parallèle avec la grève des sages-femmes qui a lieu en ce moment. Par
dévouement ou sens du devoir, si j’ai bien compris, les grévistes s’expriment
tout simplement par le port d’un brassard : « en grève », sans
interrompre leur précieux travail. J’en viens presque à prier pour qu’elles
n’adoptent pas ce désastreux effet vestimentaire qu’est devenu le bonnet rouge.
Pour ma part, les jours froids, je porte une
magnifique casquette plate. En tweed. De couleur verte.
France-Culture ? Vraiment ?
France-Culture diffuse tous les soirs à 19h une
émission qui a pour titre le rendez-vous.
S’y retrouve tout ce qu’il y a de plus branché,
pardon, de plus hype, dans le monde culturel. Le dernier cri, quoi. La
conversation est ponctuée par les pouffements hystériques du producteur et de
ses acolytes, souvent provoqués par une allusion quelconque à tout ce qui ne
saurait être dans le ton.
Il y a quelques jours, alors que j’entendais d’une
oreille distraite cette émission, me sont parvenus à l’oreille des sons
étranges.
Tout d’abord, un invité, pris d’un prurit de
snobisme cinéphilique, dissertait de l’usage fait d’une petite caméra de je ne
sais quel type, dans ses dernières années, par un certain Zven Naïcouiste. Le contexte, passé une certaine perplexité, me
permit de comprendre qu’il s’agissait de Sven
Nykvist, autrefois chef opérateur d’Ingmar Bergman. Pour un homme si
savant, il est quand même un peu dommage d’ignorer que « Sven » se
prononce avec un « s » et un « v », et que
« Nykvist » se prononce à peu près « Nukvist ». Tout
simplement.
Ensuite, le clou : un autre invité (qui avait
sans doute dû étouffer un fou rire) se trouvait être un chanteur suédois. J’ai
oublié son prénom, mais, après avoir entendu dire Naïmann, je compris qu’il se nommait peut-être Nyman. Et qu’il était originaire de Luleå, après avoir entendu dire Louléiou.
Précisons qu’on prononce, en gros, « Luléo », avec l’accent tonique
sur le « u », qui est long ; les snobs, pour faire plus couleur
locale, pourront s’essayer à un « Lulè ».
Pour qui parle suédois, un tel massacre est à se
tenir les côtes. Bon, me direz-vous, ce n’est pas évident, le suédois n’est pas
une langue dont le rayonnement est immense, et cessez de la ramener parce que
vous avez la chance de parler une langue rare. Je veux bien, mais je signale à
ces objecteurs qu’ils auront l’occasion d’entendre de tels cuirs avec des noms
anglais, allemands, espagnols ou italiens, et même français, à de plus rares
occasions, certes. Tout aussi risibles.
Cela s’appelle France-Culture. C’est plein, à en
déborder, de gens cultivés, ouverts, curieux de l’autre (vous savez, ce fameux autre,
qui nous ouvre tant d’horizons : prière de me le faire connaître ;
pour ma part, je rencontre des hommes et des femmes). A un tel point qu’il ne
leur viendrait jamais à l’idée de demander comment se prononce un nom qu’ils
vont citer – à l’invité, par exemple, ne serait-ce que pour avoir la politesse
de ne pas écorcher son nom.
Transposez cette minuscule anecdote à tout autre
domaine que celui de la prononciation des noms étrangers, et vous serez en
mesure de vous faire une idée de la rigueur des journalistes, en particulier de
ceux de notre radio nationale.
Dans la dignité, disent-ils ?
De ceci, en revanche, vous aurez certainement
entendu parler : un groupe de dix-sept personnes, choisi par un institut
de sondage au nom du comité consultatif
national d’éthique pour sa représentativité
de la population française, s’est réuni quelques jours pour émettre des avis
sur l’euthanasie : il en ressort des recommandations pour légaliser le
suicide assisté. Ce qui appelle quelques commentaires :
Premièrement, le susnommé comité a été récemment remanié
avec des membres réputés bien disposés envers M. Hollande et certaines de ses
promesses de campagne.
Deuxièmement, ce comité, pour éviter d’avoir à se
prononcer lui-même, fait sélectionner une poignée de quidams selon des procédés
qui nous sont inconnus. Lesquels quidams sont censés nous représenter. Première lâcheté.
Troisièmement, M. Hollande, avant de le remanier,
avait déclaré que sur la question visée il ne se prononcerait qu’après avoir eu
l’avis de ce comité. Seconde lâcheté.
Quatrièmement, il faudrait dire à ceux qui essaient
de nous faire gober qu’exiger comme un droit une aide de la part de médecins
pour se suicider ou pour achever un mourant[v]
– comme une vieille bourrique blessée à mort – se nomme droit à mourir dans la dignité, que mourir dans
la dignité consisterait plutôt à pouvoir être entouré de gens dévoués ou
aimants dans des moments qui ne seront pas drôles et qui seront certainement
fort pénibles.
Mais j’ai l’intuition que le monde moderne n’a pas
le temps. Un mourant qui souffre, c’est un problème. Son agonie peut durer.
Mieux vaut se débarrasser du problème, pensera le monde. Et retourner à ses
petites affaires. J’oserai même faire un parallèle avec l’avortement : une
femme enceinte est en détresse ? Eh bien, le monde lui proposera de
supprimer le « problème » que pose l’enfant qu’elle porte. Ce qui est
beaucoup moins encombrant que de chercher un moyen d’aider cette femme à élever
son enfant.
Une dernière chose me frappe : dans cette
affaire d’euthanasie, de même qu’au moment du « débat » sur le
simulacre de mariage dit pour tous, on a vu des élus « écologistes »
en pointe pour promouvoir ce genre d’avancées.
Alors qu’on les entend peu en matière d’environnement. Drôles d’écologistes, en
vérité…
Je n’ai pas dit là grand-chose de neuf, mais le
répéter ne peut pas faire de mal.
Espérance, toujours
Avec la même pensée et les mêmes prières que les
semaines passées pour le père Georges Vandenbeusch…
[i] Et le
prochain qui me parle de féérie ou d’enchantement à propos de Noël, je
l’attrape par le bras et l’emmène dans une église. Ce qui lui fera du bien.
[ii] Chez
moi, le renne, ça se mange. Ce n’est pas un animal de trait.
[iii]
Pourtant à peu près le seul projet raisonnable de ce qui tient lieu de
gouvernement en France aujourd’hui.
[iv]
C’est en général pendant notre sommeil que nous rêvons. Méfions-nous du veau
qui dort !
[v] C’est-à-dire à demander à
la société, à travers les médecins, d’être complice d’un suicide.
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